Influenceurs en Finance : Entre Pédagogie et Pièges

Le paysage de l’investissement a été profondément transformé par l’émergence des influenceurs financiers. Visibles sur toutes les plateformes, ils démocratisent l’accès à l’information financière. Mais quel est l’avis des professionnels sur cette nouvelle vague ? Nicolas Pagniez de Smart Patrimoine a reçu Régis Yancovici, fondateur et dirigeant de Luxavie, pour démêler le vrai du faux.

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L’Apport Indéniable des Influenceurs : Une Meilleure Éducation Financière

Régis Yancovici, fort d’une trentaine d’années d’expérience dans le métier, salue d’abord l’impact positif des influenceurs. “Quand j’ai commencé ce métier, on se désespérait du niveau en finances personnelles des clients,” se souvient-il. Grâce à eux, la pédagogie financière a fait un bond en avant, rendant des concepts complexes plus accessibles et augmentant la visibilité des sujets d’investissement. Leur maîtrise des algorithmes de plateformes comme YouTube et LinkedIn y est pour beaucoup.

Les Zones d’Ombre : Entre Placement de Produits et Conseils Simplistes

Cependant, l’expert de Luxavie met en garde contre plusieurs aspects :

  • Placement de produits et transparence : De nombreux influenceurs monétisent leur audience via le placement de produits financiers ou de plateformes. Il est crucial que ces produits soient autorisés en France et que les clients soient clairement informés de ces partenariats, ce qui n’est “pas toujours le cas” selon Régis Yancovici.
  • Qualité du contenu et déconnexion des attentes : Si certains produisent un travail remarquable, d’autres diffusent des informations “déconnectées des attentes d’un investisseur privé.” L’exemple du “Dollar Cost Averaging” (DCA) est frappant. Réinventant l’investissement programmé, il encourage à acheter régulièrement sans discernement. Pour Régis Yancovici, cette approche simpliste va à l’encontre du principe fondamental d’acheter “quand c’est pas cher et vendre quand c’est cher.”
  • Projections de performance trompeuses : Les hypothèses de 8% de rendement annuel, souvent citées, peuvent être mal interprétées. L’expert souligne qu’investir une somme importante au départ pour 8% annualisé n’a pas le même résultat final que d’investir de petites sommes sur la même période, même avec la même performance annualisée. Cette nuance est essentielle et souvent omise.

Les Quatre Phases de l’Investisseur : Où Se Situe le Danger ?

Régis Yancovici explique que l’investisseur novice traverse quatre phases :

  1. Il sait qu’il ne sait pas.
  2. Il croit savoir.
  3. Il est certain de tout savoir.
  4. Il sait ce qu’il sait et ce qu’il ne sait pas.

Le danger réside dans le fait que “beaucoup de monde est en phase 3,” pensant tout savoir, souvent parce que les marchés se sont bien comportés ces dernières années. Le passage à la phase 4, où l’on délimite ses connaissances, “risque de coûter très cher aux clients” si cette prise de conscience se fait au détriment de mauvais investissements.

Le Conseil de l’Expert aux Influenceurs

Pour Régis Yancovici, la voie à suivre est claire : “Arrêtez de donner des solutions toutes faites. Aidez les investisseurs à se poser les bonnes questions.” L’objectif n’est pas d’offrir des recettes miracles, mais d’outiller les individus pour qu’ils développent une pensée critique et une stratégie d’investissement éclairée.

Conclusion : Une Première Étape Utile, Mais à Aborder Avec Prudence

Les influenceurs financiers jouent un rôle important dans la vulgarisation et l’accès à l’information. Ils peuvent être “évidemment utiles” et jouer un “rôle pédagogique très important”, mais aussi “dangereux pour certains d’entre eux”. Leur contenu doit être analysé avec prudence, en privilégiant l’apprentissage des bonnes questions plutôt que l’adoption de solutions toutes faites.